François MANNIG
Architecte DE | Master DRAQ
REGENERATION DE QUARTIERS SPONTANES
Projet de Fin d'Etudes [PFE] | ENSA Normandie
Rio de Janeiro [Brésil]
2014
![]() Estrada Lagoa Barra [Vers Gavea] | ![]() Réseau de métropoles | ![]() |
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![]() | ![]() Structure urbaine et habitat informel à Rio de Janeiro | ![]() Part des habitants des quartiers spontanés à Rio de Janeiro |
![]() INTENTIONS - Protéger la lisière forestière de l'expansion urbaine - Accompagner la croissance urbaine - Valoriser l'architecture spontanée [sans architecte] - Réduire les vulnérabilité environnementales | ![]() INTENTIONS - Intégration urbaine des quartiers spontanés - Intégration sociale des population vulnérables - Nouvelles opportunités économiques - Renforcement de l'habitat social par l'auto-construction | ![]() Plan de situation Fragment urbain |
![]() Caractéristiques de Rocinha | ![]() Densification horizontale | ![]() 1930: Abris 1ère génération Structures précaires Pièce unique Point d'eau collectif |
![]() 1940-1950: Abris 2ème génération Séparation des espaces Eléments architectoniques Appropriation | ![]() 1960: Cellule d'habitation en dur | ![]() Densification verticale |
![]() GÉOGRAPHIE DE ROCINHA | ![]() ESPACE PUBLIC | Fragment urbain | ![]() PLAN DE DENSITÉ | Fragment urbain |
![]() Lecture du site | ![]() Stratégies d'intervention | Rocinha | ![]() Typologie habitat |
![]() PLAN GUIDE | Fragment urbain | ![]() Plan programmatique | ![]() PHASAGE |
![]() PRESCRIPTIONS URBAINES | Extension | ![]() PRESCRIPTIONS URBAINES | Surélévation | ![]() PRESCRIPTIONS URBAINES | Constructions neuves |
![]() Requalification de la Praça dos Boiadeiros et connexion avec la rua do Valão | ![]() Axonométrie Praça dos Boiadeiros et nouvelle connexion avec la rua do Vaão | ![]() Praça dos Boiadeiros et son marché couvert |
![]() Requalification viare et paysagère de la Rua do Vélão | ![]() Praça do Valão Création d'un place en gradin Densification | ![]() Rua do Valão Restructuration viaire, promenade, activation des rez-de-chaussées et densification |
![]() Nouvelle promenade en bord de rivière | Rua do valão | ![]() Equipement sportif et place communautaire | ![]() Nouvelle voie de circulation avec assainissement, surélévation et extension |
![]() Parc et jardins communautaires en lisière du quartier |
Au Brésil, 85% de la population habite dans les centres urbains. La Ville, dans son maillage national, engendre de forts rapports de force qui se traduisent par des contrastes parfois saisissants.
Rio de Janeiro a connu un essor de la favela en parallèle de son évolution
urbaine au cours du XXè siècle. Aujourd’hui, elle reste une des villes où les contrastes entre les catégories de population à faible et haut revenus sont les plus marqués. La favela a su se faire une place dans les anfractuosités de la ville dite formelle et de son relief. Elle se bat encore aujourd’hui pour obtenir les mêmes droits d’urbanité et de citoyenneté que les autres quartiers de la ville.
UNE METROPOLE FRAGMENTEE
La Région Métropolitaine de Rio de Janeiro est, après São Paulo, le deuxième pôle de richesse du pays, concentrant 70 % de la force économique de l’État et 8,04 % de tous les biens et services produits dans le pays. Pendant de nombreuses années, la Région Métropolitaine de Rio de Janeiro a concentré le deuxième plus important pôle industriel du Brésil, comprenant, raffineries de pétrole, industries navale, métallurgique, pétrochimique, sidérurgique, textile, pharmaceutique, édition, boisson, cimenteries et manufactures.
Cependant, ces dernières années, on constate une transformation de son profil économique, devenant un pôle majeur de services et d’entreprises.
Depuis la création de la Région Métropolitaine de Rio de Janeiro qui regroupe aujourd’hui 21 municipalités, plusieurs ont quitté ce regroupement
car la métropole n’a pas tenu ses promesses de coordination et de développement régional initialement prévus. Des services de base tels que les mobilités, l’assainissement et le logement n’ont pu satisfaire les besoins croissants de la population carioca, ce qui explique la croissance continue
des quartiers informels sur le territoire métropolitain.
Bien que la croissance démographique ait fortement ralenti ces dernières années, les favelas continuent d’accueillir toujours plus de personnes
exclues des systèmes immobilier et économique de la ville formelle. Tandis que dans les parties nord et ouest de la ville, les favelas s’étalent sur des zones et des quartiers accrochés à d’anciennes activités industrielles et aux infrastructures de mobilités, dans le centre ville et la zone sud, les favelas occupent des zones accidentées, et difficiles d’accès que la ville formelle n’avait pas intégrées à ses plans directeurs au cours du XXème siècle.
Ainsi, à Rio de Janeiro, les favelas font partie intégrante du paysage urbain de la ville, jouxtant les quartiers les plus aisés.
La ville à laissé ces zones croître sans accompagnement de l’appareil de
l’État. En niant ces zones, celles-ci se sont consolidées, à la fois sur le plan urbain (infrastructures et équipements) et architectural, passant des cabanes primitives (masures en bois) aux immeubles de plusieurs étages, mais également sur le plan social, en voyant naître un esprit communautaire et solidaire afin de contrer les appétits parfois violents des entrepreneurs puissants.
Depuis les années 1990, la ville de Rio à changé son regard sur ces morceaux de ville qu’elle nomme désormais HABITATION INFÉRIEURE À LA NORMALE: Il s’agit d’un ensemble constitué d’au moins 51 unités de logement (cabanes, maisons ...) manquant pour la plupart des services publics essentiels, occupant ou ayant occupé jusqu’à récemment, les terres appartenant à des tiers (public ou privé) et disposées de façon généralement
dense et désordonnée. Cette définition officelle montre une politique de reconnaissance et d’inclusion en cours dans la ville.
DES POLITIQUES URBAINES INCLUSIVES?
Le noyau historique de la ville s’est fondé sur les premiers bastions militaires au XVIème siècle. Auparavant réservés aux élites locales, il accueille progressivement les populations pauvres de la ville (migrants, dockers, prostituées, …) qui s’approprient les anciennes demeures coloniales du centre villes tandis que les familles aisées construisent leurs villas sur les hauteurs de Santa Theresa, loin de la chaleur urbaine et des maladies liées à la surpopulation. Les « cortiços », habitations collectives surpeuplées, sont les prémices des favelas cariocas.
Cependant, tandis qu’auparavant les pauvres étaient situés en plein cœur de la vie économique, les différentes réformes urbaines initiées par le maire
Pereira Passos à partir de 1903 ont contraint ceux-ci à quitter le système
immobilier formel pour les franges de la ville. Le relief escarpé de Rio fut propice à des implantations sauvages car ceux-ci découpent la trame urbaine jusqu’au bord de mer.
C’est à partir des années 1990 que la question des favelas revient sur le devant de la scène. Le programme « Favela-Bairro » vise à améliorer structurellement les favelas de la ville pour en faire des quartiers officiels. Cela passe par une urbanisation partielle des voiries, des programmes d’habitation sociale et l’implantation d’équipements sanitaires et de proximité. En dix ans, ce programme aura transformer près de 150 quartiers.
ORIGINE ET EVOLUTION URBAINE
Rocinha est connue aujourd’hui pour être la plus grande favela du Brésil abritant entre 70 000 et 300 000 personnes. Situé dans la zone sud de la ville, le quartier créé en juin 1993 est enclavé entre la forêt de Tijuca et le morro Dois Irmãos (respectivement 650 et 535 mètres d’altitude).
Le quartier de Rocinha possède un des niveaux de revenu les plus faibles de la ville tandis que les quartiers voisins de São Conrado et Gavéa ont un des niveaux de revenu les plus élevés. La croissance urbaine de Rocinha a débuté en 1927 avec la subdivision de la ferme originelle en diverses parcelles. Dès lors, plusieurs commerçants achètent des terres principalement dans le quartier Barcelos qui représentait une interface de commerce et de service entre les favelados et le reste de la ville. Parallèlement à cette occupation légale, des migrants venus du Nordeste ont progressivement occupé les terres hautes de l’ancienne ferme en croyant bien souvent qu’elles n’appartenaient à personne.
La viabilisation de la route en 1938 favorise l’installation des favelados, le long de celle-ci. Une fois l’espace à proximité de la voie saturé, la favela s’étant sur les franges périphériques. Dans les années 1960 et 1970, l’ouverture des tunnels Rebouças et Dois Irmãos favorise une nouvelle vague d’expansion s’appuyant sur une plus grande offre d’emplois dans la région. Les vagues de migration importantes de ces décennies, a entraîné parallèlement à la croissance horizontale une densification verticale.
L’indifférence du gouvernement envers la communauté, le manque d’infrastructures, la dégradation des espaces verts, la croissance incontrôlée, entre autres problèmes, a causé une grande indignation, conduisant la population à s’organiser et à s’engager dans de nombreuses protestations au nom de la communauté.
Le 13 Novembre 2011, la Rocinha fut le théâtre d’une opération majeure
menée par les forces armées brésiliennes visant au retrait des groupes de narcotrafiquants. La communauté dispose de 80 caméras de surveillance pour aider à la sécurité de la communauté, encadrée par 700 agents de police.
LECTURE DU SITE
GEOGRAPHIE:
Situé dans la zone sud de la ville, le quartier de Rocinha s’est développé sur le versant de la coline marquant la limite naturelle entre les quartiers de Lagoa au nord et de São Conrado au sud.
Cet amphithéâtre naturel et l’occupation sauvage engendrent des situations dangeureuses pour les habitants (glissement de térrain, ruissellement, fragilisation des sols, ...)
ESPACE PUBLIC:
L’espace public dans le quartier de Rocinha se structure autour de deux grandes catégories:
- Une dizaine de voies de circulation viabilisées qui accueillent tout les modes de transport motorisés (voiture, bus, moto, taxi)
- Un système de rhizome constitué par d’innombrables venelles qui permettent de déservir l’ensemble des «poches» résidentielles. Uniquement praticables par les piétons, elles rendent cependant difficile l’accès aux habitants mais aussi aux services publics (transport public, pompier, ambuance, police, ...)
DENSITE
A l’origine, quelques cabanes entourées de végétation peuplaient cette coline. Aujourd’hui, le processus d’occupation à d’un part presque complètement fait disparaitre cette végétation mais on constate que les maisons en dur se supérposent parfois jusqu’à 8 niveaux pour former un ensemble urbain excessivement dense: entre 1050 et 2010 hab/ha!
PRESCRIPTIONS URBAINES
Les habitants, « autoconstructeurs » de classe populaire, ont naturellement optimisé leur espace, créé des lieux de sociabilité et conçu une architecture logique et économique. Des stratégies communautaires qui bien sûr ne suffisent pas face à l’absence d’infrastructures urbaines.
Je propose de nouvelles prescriptions urbaines et architecturales qui s’appuiront sur les interventions d’infrastuctures publiques [trame viaire, requalification de voies, venelles, ...] ainsi que sur le modèle de développement existant sur place : l’autoconstruction!
CONSTRUCTIONS NEUVES
La création ou requalification de voies (carrossables) nécessite la destruction de 540 logements qui laisseront place à de nouvelles opportunités foncières.
- Création de places publiques
- Constructions neuves avec alignement
- Constructions neuves avec élargissement ou création de venelles/cours
- Surélévation des constructions pour créer des espaces mutualisés [stationnement, place couvertes, ...]
EXTENSIONS
Les logements au sein de la favela sont bien souvent étroits et offrent peu d’espaces spécifiques aux habitants. Les extensions en façades permettront ainsi l’augmentation de la surface habitable tout en respectant les gabarits de rue [ensoleillement, ...]
- Espaces extérieurs: balcons, loggia, ...
- Module d’extension: pièce supplémentaire ou agrandissement.
SURELEVATION
L’autoconstruction étant directement liée aux besoins nouveaux des habitants ou des nouveaux arrivants, l’ensemble architectural de la favela est très hétérogène [construction entre 2 et 9 étages]. Il est donc possible d’augmenter l’offre de logement par la surélévation de certaines constructions.
Dans ce cas, les matériaux locaux et renouvelables sont à privilégier. Le bois permet une rationalisation du chantier tout en offrant des structures légères.
INTERVENTIONS
PRAÇA DOS BOIADEIROS | MARCHÉ | PÔLE TRANSPORTS | REVITALISATION CANAL
On est ici dans le cœur économique du quartier de Rocinha. C’est en effet la partie « basse » du quartier qui accueille la majorité des activités économiques, marchés, équipements, ...
L’opération ici consiste à la réactivation du secteur via différents leviers:
- Requalification des voies : des espaces spécifiques pour les véhicules
motorisés, les piétons et un espace public sécurisé (trottoirs, canal, place)
- Connexion nouvelle entre rue du Valão et rue du Canal par le percement de l’alignement existant des immeubles
- Création d’une place de marché couvert avec espace végétal
- Végétalisation des abords du canal
- Pôle de transport sur une place couverte
- Activation des RDC avec des commerces et services
PLACE PUBLIQUE | PROMENADE AU FIL DE L’EAU | COMMERCES
Il s’agit ici de la création d’une nouvelle voie de circulation permettant
de relier les parties basse et haute de la favela. Le parti pris consistait à révéler et revitaliser le parcours de l’eau dans le quartier.
Tandis qu’auparavant, l’eau de pluie et une partie des égouts à l’air libre circulaient entre les habitations, aujourd’hui, la nouvelle voie intègre un système de canalisation pour l’approvisionement et le retrait des eaux usées.
De plus, la mise à jour et la végétalisation de la rivière réduisent grandement les risques de glissement de terrain et renforce naturellement le sol.
Les habitants trouveront ainsi une nouvelle promenade bordée d’espaces de convivialité de qualité et de nombreux commerces et services de proximité.
JARDIN COMMUNAUTAIRE | PARC BOISE | NOUVELLE RUE | MINI-STADE| PLACE COUVERTE
Les franges escarpées du quartier restent les secteurs occupés par les plus démunis. Loin du coeur économique ou des transports, il faut parcourir
d’innombrables venelles pour rejoindre les services quotidiens ou son lieu de travail.
Les infrastructures publiques ont donc pour but d’irriguer de manière plus équilibrée tous les secteurs de la favela en apportant des équipements
sanitaires [égouts, eau potable, électricité] ainsi que de nouvelles mobilités [funiculaire, transport en commun, ...] permettant aux services de secours
[ambulances, pompiers, police] d’assurer un service équitable.
- Equipements sportifs et de loisirs : ministades, skate park, place publique... adaptés aux conditions géographiques. La complexité pouvant apporter de la richesse à ces micro-projets!
- Nouvelle voies carossable accueillant à la fois les véhicules particuliers, les transports en commun [bus, moto-taxi, touristes] ainsi que les places de
stationnement.
Ces infrastructures permettront de développer les offres commerciales et de
service de proximité, sur rue, au plus près des habitants.
- Jardins communautaires et parc boisé pour assurer une part des besoins alimentaires (prix et santé!) ainsi que le renforcement des sols qui protègera le quartier en contrebas.